thématiques abordées et explications
La planification de l’entrainement joue un rôle central dans la performance sportive. Dans les sports collectifs, la planification est majoritairement construite à l’échelle du microcycle (de la semaine). Ses objectifs principaux sont généralement de permettre la récupération du match précédent, de maintenir, voire de développer le potentiel physique des athlètes, ainsi que de les préparer pour assurer la performance lors du match suivant.
Récemment, l’utilisation de la planification tactique s’est répandue à travers la majorité des équipes de haut niveau. Cette méthodologie propose de réaliser des charges légères en début de semaine, orientée vers la récupération. S’en suivent des charges élevées, 4 et 3 jours avant le match suivant, s’orientant sur les qualités physiques de force, et aérobie, respectivement. Lors des deux dernières journées avant le match, l’objectif s’oriente alors sur un affutage. À J-2, la séance s’oriente sur la qualité de vitesse avec une diminution de la charge d’entrainement en comparaison des deux journées précédentes. Enfin, à J-1, la charge de travail diminue encore.
La littérature scientifique semble rapporter une utilisation semblable de cette méthodologie dans les centres de formation, et dans les équipes professionnelles. Pourtant, les objectifs de ces populations sont distincts. Les centres de formation doivent combler l’écart technique, tactique et physique entre leurs joueurs et les professionnels. De ce fait, le développement doit représenter une partie significative de l’entrainement en centre de formation. Cette partie de l’entrainement ne doit pourtant pas entraver la performance compétitive. Les équipes professionnelles quant à elles, se focalisent sur la performance compétitive. Ces objectifs distincts devraient alors mener à des planifications différentes du microcycle.
L'objectif de ce travail de thèse était donc de réaliser un état des lieux des stratégies de planification du microcycle dans les centres de formation de football français, et d'explorer des alternatives permettant d'optimiser le développement physique sans compromettre la performance compétitive des joueurs.
Ce travail de thèse a alors débuté par une étude réalisée sous forme de questionnaire afin de connaître la planification physique typique dans les centres de formation français. Cette étude a permis de confirmer que les centres de formation recherchaient majoritairement le développement. 95% des préparateurs physiques rapportaient prioriser le développement physique par rapport à la compétition. Pourtant les contenus d’entrainement correspondent à ceux proposés chez les professionnels, adhérant aux principes de la planification tactique, et pourraient donc ne pas être suffisant. En effet, on observe une réduction des charges d'entrainement dès J-2, et une utilisation très réduite de contenus d'entrainement dissociés comme la musculation ou encore la pliométrie.
Lire : Planification physique hebdomadaire typique dans les équipes de football des centres de formation français : une enquête
Notre deuxième étude proposait alors de tester une planification des charges d'entrainement modifiée par rapport à la planification typique, en inversant les charges d’entrainement de J-3 et J-2. L'objectif était de réaliser la seconde journée de développement (à J-2) avec moins de fatigue grâce à la journée à charge réduite (à J-3) entre les deux journées de développement durant la planification modifiée. Cette planification modifiée permettait d’obtenir des charges externes supérieures lors de la seconde journée à charge élevée, notamment à haute intensité (distances >20 km/h), tout en ayant un état de forme le jour de la compétition supérieur à la planification typique.

Cette planification, permettant de réaliser des charges externes supérieures à haute intensité, sans compromettre l'état de forme compétitif, pourrait permettre d'optimiser le développement physique à long terme. Malgré ces résultats mettant en avant la planification modifiée comme une stratégie efficace, il est important de garder à l'esprit que ces résultats ont pu être obtenus grâce au facteur de variation par rapport à l'habitude des joueurs. De ce fait, il est indispensable de varier les modèles de planification pour optimiser le développement physique.
Lire : Influence d'une planification du microcycle modifiée par rapport à une planification typique sur les charges externes hebdomadaires et l’état de forme le jour du match chez des joueurs de football élite d’un centre de formation.
Suite à cette étude, nous nous sommes intéressés à l’ordre des séances au cours du microcycle, et plus particulièrement, les qualités physiques dont le développement est recherché lors des séances à charges élevées. D’après les réponses du questionnaire de l’étude n°1, les préparateurs physiques recherchent majoritairement le développement aérobie/force lors de la première journée à charge élevée, puis de la vitesse lors de la seconde.
Nous avons donc réutilisé la planification modifiée vu précédemment qui s’était montrée supérieure à la planification typique. Dans cette nouvelle étude explorant l’impact de l’ordre des séances à charges élevées, nous avons donc comparé une planification recherchant le développement aérobie à J-4 et de la vitesse à J-2, avec une planification commençant par le développement de la vitesse à J-4, puis aérobie à J-2. Nous nous sommes alors focalisés sur les distances parcourues sur ces séances dédiées au développement physique, ainsi que l’état de forme entrainé le jour du match. Nous émettions l'hypothèse que les joueurs parcourraient des distances supérieures pour chaque séance lorsque celles-ci sont placées en début de semaine, à J-4, plutôt qu'à J-2. Nous émettions également l'hypothèse que ces changements n'impacteraient pas la performance compétitive.

Cette étude a permis de montrer la nécessité de planifier la qualité dont le développement est recherché en début de semaine, à J-4, plutôt qu’à J-2. En effet, chaque qualité démontrait des distances parcourues supérieures dans les zones de vitesse dont le développement est recherché en début de semaine (vitesse de moyenne et haute intensité pour la qualité aérobie – vitesse de haute et très haute intensité pour la qualité de vitesse). De plus, quel que soit l’ordre des séances, l’état de forme ne montrait pas de variation le jour du match. Ces résultats démontrent alors que contrairement aux principes issus de la planification tactique, les qualités physiques peuvent être développées à divers moment de la semaine sans impact sur la performance compétitive. Il est important de garder à l'esprit que ces résultats ont pu être obtenus grâce au facteur de variation par rapport à l'habitude des joueurs et donc que varier les planification peut permettre d'optimiser le développement physique.
Lire : Influence de l'ordre des séances du microcycle compétitif sur les charges externes hebdomadaires et l'état de forme le jour du match chez des joueurs de football élite d'un centre de formation.
Notre quatrième étude s’est cette fois penchée sur la quantité d’entrainement permettant de satisfaire l’objectif de performance compétitive lors de la veille de match. L'étude n°1 sous forme de questionnaire nous a permis de mettre en évidence que les préparateurs physiques proposent à leurs joueurs une séance de veille de match composée de travail de vivacité et de jeux réduits pour une durée d’environ 60min dans un objectif d’affutage. Or ces contenus peuvent paraître trop exigeants et donc ne pas satisfaire cet objectif de réduction de la fatigue accumulée lors de la semaine. En effet ces contenus (notamment les jeux réduits) sont également utilisés à d'autres moment de la semaine dans un objectif de développement.
Nous avons donc testé l’impact de trois durées différentes lors de cette séance typique sur l’état de forme compétitif. La durée d’entrainement (et ses composantes) a alors été allongée et diminuée de 25% par rapport à la séance typique. Cela donnait alors lieu à une comparaison de trois séances d’une durée de 45min, 60min, ou 75min.

Les résultats montraient une performance physique significativement supérieure le jour du match suite à l’entrainement de 45min en comparaison des deux autres durées. Ce résultat était également confirmé par l’état de forme subjectif rapporté par les joueurs à l’aide du questionnaire Hooper. Nous proposons alors de réduire la durée de cette séance si les contenus de vivacité et de jeux réduits sont conservés, ou bien de changer les contenus pour des exercices moins exigeants physiquement.
Lire : Impact physique d'une séance d'entraînement typique le jour précédant un match avec différents volumes chez des joueurs de football élite en centre de formation.
Notre cinquième et dernière étude a utilisé les données GPS mesurées lors d’une saison complète. Cette étude avait pour but de vérifier si l’entrainement recréait de manière équivalente les exigences compétitives au sein des différents postes. Afin de répondre à cette question nous avons comparé les charges de travail de chaque jour de la semaine en utilisant une quantification de manière absolue, ou relative. La quantification de manière relative permet d'exprimer les charges de travail en fonction des capacités propres à chaque athlète et donc d'individualiser les charges d'entraînement. Celles-ci sont alors exprimées en pourcentage des données moyennes individuelles de match de chaque joueur. Si l’entrainement récrée de manière équivalente la compétition pour tous les postes, aucune différence ne devrait apparaître entre les postes avec la quantification relative. Les modifications de la planification devraient donc se situer sur l'évolution des charges de travail comme proposé dans les 3 études précédentes.

Les résultats montraient alors des différences significatives, quelle que soit la méthode de quantification des charges de travail. De plus, cette quantification apporte de nouvelles perspectives, montrant que les postes qui semblent les plus exigeants en utilisant les valeurs absolues (les milieux excentrés) sont en réalité les postes les moins exigeants lorsqu’on exprime leur charge en fonction de leurs capacités compétitives, au profit d’autres postes (attaquants, défenseurs centraux, milieux axiaux). Les staffs devraient donc chercher prioritairement à satisfaire les principes d'individualisation et de spécificité.
Lire : Différences entre les postes dans les charges d'entraînement absolues et relatives chez des joueurs de football élite en centre de formation.
Les plans d’entrainement devraient alors plutôt adhérer à la définition que nous proposons :
« la construction du plan d’entrainement est le principe par lequel les praticiens gèrent la charge d’entrainement de leurs athlètes, en tenant en compte des variations inter- et intra-individuelles dans les réponses aux stimuli spécifiques aux demandes compétitives de ceux-ci. Cette gestion de la charge d’entrainement est effectuée par un suivi quotidien de la charge externe et interne (physiologique et psychologique, de manière objective et subjective), permettant d’augmenter progressivement les charges de travail. Le plan d’entrainement doit alors permettre une variation des charges et des contenus d’entrainement à travers une périodicité du plan menant à des phases de développement et de récupération. »